l’exposition prendre soin? a eu lieu dans la pharmacie du centre hospitalier du tonnerrois (à tonnerre) du 7 juillet au 7 septembre 2017.
co-commissariat diane watteau et jean-louis déotte
le vernissage a eu lieu le 7 juillet, une journée d’études a eu lieu ce jour-là autour du soin, du care, de la sollicitude.
la liste des artistes est la suivante :
pierre baumann, philippe bazin, thibault daelman, agnès foiret, béatrice martin, myriam minhidou, françoise parfait, jeanne suspluglas, yann toma, véronique verstraete.
le programme de la journée d’étude :
matinée
9h30 : ouverture : jean-louis déotte et diane watteau
modération : christiane vollaire, philosophe, membre de la rédaction des revues pratiques et chimères, co-responsable du programme non-lieux de l’exil (ehess-inalco).
9h45 : jean-louis déotte, professeur de philosophie émérite paris VIII
10h15: adolfo vera, professeur de philosophie, l’université de valparaíso, chilil’artiste, technocrate ou génie? à partir de la pharmacie de platon de j. derrida.
dans son interprétation du phèdre de platon, jacques derrida (la pharmacie de platon), pointe le fait que l’écriture–comme la peinture et les arts mimétiques en général- y sont caractérisés comme étant secondaires par rapport à l’oralité. comme le mythe, l’écriture serait une affaire de fonctionnaires et de technocrates. l’art, en tant qu’inscription et lié à des divinités égyptiennes comme theut, a aussi un rapport dangereux avec l’occultisme, la magie, et la drogue (phármakon). pour corriger cela, le remède doit être la dialectique : exercice de la raison face à face, en présence, et sans recours à des procédés qui essaient de tromper le sens de l’autre (le trompe l’œil, par exemple). à partir de ces discussions, nous voudrions reprendre quelques aspects qui depuis l’esthétique kantienne (notamment avec sa théorie du génie) ont marqué les analyses autour de la place de l’artiste dans la société et l’espace public : doit-il–comme c’était le souhait des avant-gardes- des-institutionnaliser l’espace public en l’investissant d’une temporalité de la présence pure contre toute inscription qui perdurerait dans le temps, choix repris par les performers depuis beuys jusqu’aux théories de l’esthétique relationnelle, et qui ne peut être que paradoxale puisqu’il a besoin du registre (photographie, vidéo) et de l’espace muséal pour exister ? ou doit-il se mettre au service des commandes des institutions pour les détourner, au risque d’être considéré comme un artiste-fonctionnaire (cf. gerz, buren, jaar, etc.) ? on dira que le premier choix –dont la critique a commencé à être faite déjà par adorno- est un choix platonicien, et nous essaierons de définir un modèle d’artiste-fonctionnaire qui pourrait être à la hauteur des exigences politiques de notre temps.
10h45 – pause
11h 10: vanessa desclaux, curator, critique d’art, enseigne aux beaux-arts de dijon
titre : de quelles manières les pratiques artistiques et curatoriales s’adressent-elles au corps aujourd’hui ? éthiques de la transformation, du déplacement et du souci de soi dans le champ de l’art contemporain. le soin procuré traditionnellement à l’objet et qui est au centre de la fonction muséale de « conservation » s’est ainsi graduellement déplacé vers un souci dirigé vers les corps : de l’artiste d’abord, puis ceux des performers et interprètes auxquels les artistes ont pu faire appel, et aux corps des spectateurs. je souhaiterais ici interroger différentes approches qui ont récemment émergées dans le champ de l’art contemporain à travers lesquelles le souci de soi, des autres, et en particulier la manière dont leurs corps sont adressés et pris en charge, apparaissent comme des enjeux fondamentaux dans différentes pratiques artistiques et curatoriales. si ces pratiques font écho à des pratiques qui les ont précédées historiquement (par exemple lygia clark ou fernand deligny), elles réinscrivent dans le contexte artistique actuel l’urgence politique d’une éthique de la transformation, du déplacement et du souci de soi, et font état de formes de résistance vis à vis des violences politiques, sociales et économiques qui caractérisent notre présent.
11h35 : gérard danou, médecin et docteur hdr lettres, paris VII
titre : pour une dynamique des rapports de pouvoirs et de savoirs dans le soin médical. l’émergence de la maladie vih ou sida, dans les années 1980-90, a produit un véritable « fait social total » qui, sous la pression des associations de malades a bouleversé les rapports traditionnels des pouvoirs et des savoirs avec le corps médical; le malade devenant selon l’expression de d. defert un « réformateur social ». les nombreux écrivains touchés par le sida en ont témoigné. l’écriture conférant au récit de l’épreuve traversée, une dimension d’universalité.
après-midi
modération : béatrice martin, prag arts plastiques, doctorante, université paris 1 panthéon-sorbonne
14h30 – sarah roshem, art & care, docteur en arts plastiques, équipe de recherche art&flux, acte, université paris 1 panthéon-sorbonne.
titre : l’hospitalité comme geste artistique à l’heure de ces grandes migrations humaines, notre capacité à accueillir est questionnée. elle nous met au travail et au défi aujourd’hui de réinventer des formes d’hospitalité, des gestes qui sauvent de l’indifférence. comment l’artiste, au travers de son œuvre, de ses actions, peut-il donner forme à cette intention de créer un monde proprement humain ? être hospitalier peut-il être un beau geste qui sauve celui qui le prodigue autant que celui qui le reçoit ?
15h – christiane vollaire, philosophe, membre de la rédaction des revues pratiques et chimères, co-responsable du programme non-lieux de l’exil (ehess-inalco).
titre : prendre soin : contre qui ? l’idéologie du care peut reproduire un discours religieux de l’universel et de la compassion qui pose un déni sur l’effectivité du désir de violence comme dynamique vitale. or ce déni, dans l’histoire même des systèmes religieux, a été le vecteur des plus grandes violences. et de même, les idéologies victimaires contemporaines produisent les plus redoutables arguments sécuritaires justifiant les violences policières. plutôt que la sollicitude, on pourra alors choisir la sollicitation, qui pousse à susciter en l’autre sa force plutôt que sa faiblesse.
15h30 – agnès foiret, artiste, mcf arts plastiques, université paris 1 panthéon-sorbonne
titre : la peinture soignée la maladie de la peinture à l’huile est le drame de son histoire ; un seul et même agent lui a donné sa vitalité en lui inoculant sa mort. avec l’introduction de l’huile de lin dans la pâte pigmentaire, la vie et la mort s’affrontent. le potentiel génératif et dégénératif de l’huile en contact avec le support induit une qualité organique à l’œuvre. si, aussi longtemps qu’elle brille de tout son éclat, la peinture à l’huile semble être une assistance de survie et apporter un démenti à la puissance de la mort, elle peut également laisser se constituer dans des signes avant-coureurs d’altérations qui vont affecter la créativité de la vie psychique. on peut considérer que l’histoire de la peinture est marquée par le rapport de hantise entre la bonne santé et la maladie. que signifierait alors prendre soin de la peinture ? une peinture soignée se tiendrait à distance de l’extase et du drame et chercherait à se dégager de la vicissitude existentielle pour instaurer des éléments du « vivre ». d. arasse, consacrant une étude de la peinture par ses détails, explique que sa première approche de la question prenait appui sur le rapport entre le regard et la distance. nous verrons dans les œuvres de ryman, opalka, al martin, pierrette bloch, comment la peinture cherche un passage, suit un cheminement entendu comme mouvement de dépassement conjugué avec la matérialité tangible, l’écartant du miracle du bien portant et du pathos du mal portant.
16h 30 – table ronde avec les artistes
modération : diane watteau, mcf en arts plastiques, université paris 1 panthéon-sorbonneavec : jeanne susplugas, pierre baumann, myriam mihindou, véronique verstraete, yann toma, agnès foiret, philippe bazin18h – vernissage de l’exposition et performance de jeanne susplugas, mass destruction